unsound

pseudo, prénom : citizens, jennifer. âge : vingt deux ans. pays : dans l'ouest de notre belle france. avatar : dane dehaan. inventé, scénario, prédéfini : inventé, sur les idées de deux jolies demoiselles. crédits : jukebox joints commentaire :  

DÉCEMBRE 1889 - Sur les carreaux la pluie battante tapait, et quelques éclairs venaient périodiquement éclairer cette pièce qui ne l'était que par de simples bougies et autres chandelles tenues par des serviteurs en cette nuit glaciale. Le silence régnait, brisé par les cris d'une femme en souffrance allongée sur ce lit que personne ne quittait des yeux. La pièce n'était emplie jusqu'à son comble, mais sûrement pouvait-ont tout de même compter une dizaine de faciès. Tous attendaient, n'osaient détourner le regard quand bien même était-ce leur souhait. Et au milieu, le mari, le plus stoïque de tous. Telle une statue de pierre, ses paupières ne paraissaient jamais s'abaisser, et ses mains semblaient liées dans son dos. Peut-être bougeait-il les doigts, mais personne ne pouvait le deviner, n'osait véritablement de toute façon le regarder, celui qui ne se mouverait finalement qu'à l'entente du premier cri. « C'est un garçon. » L'homme qui avait donné naissance à l'héritier se retournait vers le père, tendait l'enfant vers la foule tel un trophée afin que chacun puisse l'admirer. « Un garçon, que les dieux soient loués. » Un garçon, enfin. Le dernier né du couple réjouissait ce père qui par trois fois avait connu la déception d'accueillir des filles. Et il levait les bras au ciel alors qu'une prière était récitée par un homme de foi, puis s'emparait de l'enfant, son enfant, celui qui resterait le seul mâle auquel il donnerait naissance.

JUILLET 1902 - Il ne pouvait détacher son regard d'elle, cette petite chose fragile aux pupilles fuyantes. Cette peau si pâle, cette chair révélant bien trop ses os, l'entièreté de son corps devenait son obsession. Et à mesure que les jours s'écoulaient, il la dévisageait davantage, s'en approchait toujours plus, se l'accaparait et faisait fuir ceux qui s'en approchaient. Il ne voulait la protéger, seulement pouvoir s'en délecter seul, être le seul, l'unique qui pouvait la toucher, sentir ses frissons lorsqu'il était trop près. Et les mots qu'elle laissait échapper, il désirait qu'ils soient pour lui seul. Gamin devenu bourreau égoïste, plus ses gestes étaient violents, plus ils démontraient son attachement. « T'es à moi. » « Certainement pas. » Un nouveau coup, le pur appréciait l'audace autant qu'elle le révulsait. « T'es à moi. » Et ses mains entouraient le cou fin de la proie, le serrait aussi fort que l'était son emprise constante sur elle. Pourtant elle n'était seule esclave en la demeure, mais elle était seule à être sienne. Les autres faciès demeuraient insignifiant, seul le sien l'attirait, lui, l'infâme maître qui de lui-même s'était défini comme tel. Et personne ne semblait y voir d'objection, jamais. A quoi bon, elle n'était qu'une servante, cette chose à laquelle personne ne portait d'attention et dont le sort n'importait pas la moindre âme en ce château. Personne ne la voyait, personne ne l'entendait, personne sauf lui, celui dont les phalanges serraient toujours plus fort. « Regarde-moi. » Et la blancheur du teint s'égaillait enfin d'une couleur peu naturelle, alors qu'elle titubait, qu'il la lâchait. « T'es à moi. » Et il s'en allait, simplement, en silence, comme il le faisait chaque fois. Et lorsqu'il revenait, tout recommençait. Encore et encore, toujours plus intensément à mesure que s'accentuait l'attachement.

JANVIER 1916 - Il fixait un faciès, des pommettes dont il ne savait se détacher, des yeux qui s'étiraient au rythme de ce que de loin il décelait être des rires. Il sondait chaque mouvement, essayait de lire sur ces lèvres qui s'entrouvrait pour laisser échapper des phrases dont il ne cernait le sens. « Hè Joran, on y va. » Sourd, il n'entendait les mots, seule sa vision importait. Et alors qu'une main se posait sur son épaule, il se détournait brusquement, violemment, alors que l'auteur du geste reculait. « C'est juste moi mon pote, ça va ? » Suspicieux était le regard de l'opposant, alors que le sien s'était détaché le temps de quelques secondes de son vice, celle qu'il ne trouvait plus, qui semblait avoir disparu. « Ouais, j'arrive. » Il buvait une dernière gorgée avant de nonchalamment laisser tomber ce verre à peine entamé sur la table, alors qu'il retrouvait celle qui faisait bouillir son sang, celle qui au loin se mouvait aux côtés d'un homme dont il ne connaissait les traits. Un soupire, et à son tour il suivait les siens, essayait de se sortir de la tête celle à qui il pensait bien trop. Trop longtemps, trop souvent. Celle qui obnubilait ses songes et qu'il se retenait de confronter en l'instant, autant qu'il se forçait à ne pas laisser ses lèvres toucher les siennes chaque fois qu'il était près d'elle. Et ses poings se serraient alors qu'elle sortait de son champs de vision, comme chaque fois qu'elle s'éloignait. Elle, Sofiya, celle qu'il avait rejetée, mais dont jamais il n'avait voulu être plus proche.

FÉVRIER 1916 - « Salut. » Un simple mot, pourtant tellement. Elle ne répondait pas, et ce silence le laissait songer au fait qu'il n'était même certain de se souvenir du son de sa voix. Alors il s'asseyait, regardait ailleurs, repliait machinalement les manches de sa chemise. Ou était-ce pour gagner du temps ? Il ne le savait guère, comme sa présence ici demeurait un mystère. Voilà bien des années qu'il ne parlait plus à sa sœur, celle aux pupilles emplies de mystères dont il s'était toujours méfié. Aucun point commun, leurs routes s'étaient séparées avant même de se rencontrer. « Je te dérange ? » Politesses étonnantes, mais là encore sûrement devait-elle aussi bien que lui deviner que ce n'était que pour meubler. Et lui, loin d'être serein, attendait simplement qu'elle lui tende la main. « Il faut que je te parle, sérieusement. » « Qu'as-tu à me dire après toutes ces années de silence, petit-frère. » Elle marquait un point, bien plus d'un. Finalement, de quel droit se permettait-il de l'accaparer, celui qui l'avait toujours fuit, repoussée. « J'ai des doutes. » Elle daignait finalement relever les yeux vers son cadet, le regarder réellement, fixement, ce qu'elle n'avait plus fait depuis des années. « Des doutes ? » « A propos de.. » De biais, il regardait alors l'un des servants présent dans la pièce. « De tout ça. » Et sans un mot, elle se levait, brisait le lien entre leurs prunelles et quittait la pièce, muette, toutefois pas sans lui jeter un dernier regard. Un regard qu'ils n'avaient jamais partagé, mais dont chacun comprenait le sens.

FÉVRIER 1916 - Une goutte de sang perlait aux commissures de ses lèvres, afin de s'écouler le long de son menton pour s'écraser sur sa cape. Pourtant il ne ressentait quelconque douleur, son âme devait l'occulter, trop obnubilée par la scène qui devant ses yeux se déroulait. Elle se débattait, tentait de s'extirper des bras de son assaillant, ce garçon qui avait cru bon d'entre ses bras la prendre lorsqu'il l'avait vu littéralement sauter sur le pur. « Lâche là. » Ils se tournaient alors vers celui qui venait de laisser échapper ces mots, le plus sereinement du monde. Lui, la raison de la colère de celle qui retrouvait sa liberté de mouvement, mais qui n'en usait pour l'agresser à nouveau. Leurs rencontres ne pouvaient-elles se terminer autrement que par les coups ? Peut-être pas, après tout leur relation avait débuté comme cela. Il s'approchait, inconscient des risques, seulement guidé par son envie d'assouvir ses propres besoins. « Tu dois m'aider. » « Je ne te dois rien. » Ses lèvres s'étiraient en un léger rictus, bien-sûr qu'elle le lui devait. Elle lui devait tout, devait contenter la moindre de ses exigences. Et elle le ferait, dès lors qu'elle se serait calmée. Elle l'avait toujours fait, continuerait à le faire, parce que malgré les années elle restait sienne, du moins ce dont il était intimement convaincu, quand bien même n'avait-il plus prononcé ces mots depuis près d'une décennie. « T'es la seule à pouvoir le faire, Hedvig. » La seule, l'unique qui pouvait l'aider à comprendre, l'aider à ouvrir les yeux sur un monde qui lui déplaisait chaque jour un peu plus. Un monde effroyable duquel il n'était aussi proche qu'il le pensait. Et aussi souillé était son être, aussi endoctrinée chaque parcelle de son corps l'avait été durant ces vingt-six dernières années, son âme quant-à elle semblait demander repentance. Peut-être n'y parviendrait-elle jamais, mais il avait définitivement besoin d'elle pour le découvrir. Besoin d'elle oui, alors à nouveau, le bourreau exigeait la présence de la poupée fragile que de ses mains fermes il avait depuis bien longtemps brisée.